Culture de plants greffés : essais et conclusions 2018

A la suite du greffage de nos plants potagers (voir le tutoriel sur le sujet), nous avons mis en place nos plants dans les différentes parcelles du Jardin d’Essai, et principalement dans le tunnel. Notre volonté étant d’observer et de voir l’intérêt de la technique face à nos plants cultivés de manière traditionnelle, nous tenions à partager avec vous le fruit de nos observations et, il faut bien l’avouer, de notre échec relatif ?.

La plantation

De la vigueur, un bon rendement et une résistance aux maladies, voici les trois atouts majeurs d’un plant greffé. Il suffirait donc d’un seul pied greffé là où, d’ordinaire, deux à trois pieds seraient nécessaires. Voilà pour la théorie.

Suite au test sur le greffage de diverses espèces, nous avons mis en culture au Jardin d’Essai nos plants greffés et nos plants standards afin de les comparer.

Voici comment nous avons procédé :

  • aubergines, poivrons, concombres greffés seront testés en tunnel.
  • les melons seront plantés dans le tunnel et en extérieur.
  • les plants de tomates seront implantés à coté des tomates non-greffées, dans le tunnel horticole.

pied-légume-greffé Précisions importantes : lors de la plantation, il ne faut pas enterrer le point greffe au risque de voir se développer le porte-greffe. La greffe reste fragile et les plants seront manipulés délicatement.

Les plants greffés ont une implantation plus lente. Il est important au début de la culture d’éviter un excès d’arrosage. La technique la plus simple consiste à laisser souffrir très légèrement les plantes, il ne faut pas arroser jusqu’à constater un léger flétrissement de la plante. Une fois vos plantes installées, faire un premier arrosage et attendre 10 à 12 jours avant le deuxième.

La culture

Les poivrons et aubergines ont été plantés à la même densité (2,5 plants/m²) que des plants non greffés, avec une conduite de culture identique. La plantation des plants classiques a été réalisée le 11 avril et le 15 mai pour les plants greffés (soit une différence de 5 semaines).

Les tomate-grefféetomates greffées ont été plantées le 7 mai, une semaine après les plants standards. La densité de plantation était plus faible (1,5 plants/m²) que pour un plant non greffé (2,5 plants/m²) car nous avions fait le choix de laisser deux têtes par pied afin de répartir la vigueur du porte-greffe.

De plus, nous pensions qu’avec une plus faible densité, et deux têtes par pied, la production serait semblable aux plants non greffés, au m².

Ensuite, nous avons laissé nos plants se développer sans distinction entre greffés et non greffés. De manière générale, le retard de croissance des plants greffés a été comblé en 2 à 3 semaines.

Nous avons constaté que les tomates greffées avaient une très forte croissance végétative au détriment d’une croissance générative (par la production de fleurs, donc de fruits). Il y avait peu de fleurs et donc presque pas de fruits sur les premiers étages, contrairement aux plants standards. Cela est peut être la conséquence d’un arrosage trop important mais aussi d’un sol trop riche en azote (apport récent de beaucoup de fumure).

Pour les poivrons, melons, concombres, il n’y a pas eu de différence significative, que ce soit pour la croissance ou encore la fructification.

Concernant les aubergines, pour certaines variétés comme Dourga, il semblerait que le pied greffé ait plus de vigueur, et que les fruits soient plus gros.

En comparant les deux plants on remarque que le système racinaire est nettement plus développé pour les plants greffés :

Nous avons aussi testé le greffage sur un plant de Pépino (avec un porte-greffe Protector F1). La vigueur et la croissance du pied greffé est visuellement plus importante. Par contre, il n’y a pas d’augmentation de production de fruits… Il reste encore à démontrer l’incidence (et l’intérêt) du greffage sur ce type de production car nous rencontrons chaque fois des problèmes de fructification, avec bon nombre de fleurs non fécondées, sans raisons apparentes. Nous ne pouvons clairement pas incriminer les plants greffés mais ceux-ci n’ont pas amélioré (ni détérioré) notre problématique : beaucoup de fleurs, peu de fruits.

Le climat

A partir du 15 juillet, nous avons eu de très fortes températures dépassant souvent les 30°C. Certaines feuilles des plants de tomates greffées étaient flétries. Puis la plante se desséchait et mourait. Les racines n’étaient pas nécrosées et il ne semblait pas y avoir d’attaques parasitaires mais plusieurs plants de tomates et de concombres greffés sont ainsi morts alors qu’aucun plant non greffé n’a dépéri.

Les températures élevées sur plusieurs jours pouvaient-elles être la cause de ces pertes de plants ? Avec une forte demande en eau, la circulation de la sève au niveau du point de greffe était peut-être ralentie ou mauvaise. Ce phénomène aurait pu entraîner le flétrissement de la plante. Autre piste de réflexion : en voulant bien faire, peut être avons-nous trop arrosé au début de la culture, ce qui a pu fragiliser les plantes en ne permettant pas au système racinaire de pousser en profondeur pour aller chercher l’eau.

Ce ne sont que des suppositions et nous n’avons pas de réponses précises pour ce phénomène observé.

Conclusions

Nos résultats sont mitigés et ne sont pas à la hauteur de nos attentes. Nous avons cependant pris plaisir à réaliser nos propres greffes.

La production de tomates a été très moyenne et plutôt inférieur à un plant non greffé. Visuellement, les plants greffés étaient bien moins attractifs que les non-greffés. Il est important de noter que les conditions du tunnel horticole dans lequel les plants étaient installés sont des conditions idéales (chaleur, bonne terre amendée régulièrement, pas d’humidité, etc.) et que nos plants non-greffés ont donc tout loisir de pousser très convenablement. La différence entre greffé et non-greffé doit être plus probante dans des conditions difficiles (météorologique, sols pauvres ou infestés, etc.) où la vigueur du porte-greffe peut apporter un plus.

Nous n’avons pas observé d’attaques de parasites ou de maladies cryptogamiques (oïdium…) car la plupart des plants étaient sous tunnel et que l’été 2018 a été plutôt sec. Il est donc difficile d’évaluer la résistance des porte-greffes. Il est prévu pour la saison 2019 d’installer nos plants de tomates greffées en extérieur au Jardin d’Essai afin de mieux analyser leur comportement.

Les retours de nos clients sont souvent assez enthousiastes, avec pour la plupart des fois des bons résultats. Cela nous interpelle donc, nous ne pouvons nous en cacher. Donc, notre question sur la culture d’un plant greffé, n’est pas totalement résolu et demande à être encore approfondie. L’utilisation de plants greffés est sûrement très utile sur des terrains appauvris et/ou dans des conditions difficiles. Nous avons probablement trop choyé nos plants. Nous ferons en 2019 de nouveaux tests digne d’un stage commando et on verra bien comment ils réagiront, ces plants greffés, et s’ils sont aptent au service ! 😀

On vous tient informé !

6 commentaires Ajoutez le votre

  1. Bigoudi dit :

    Bonjour

    Plants greffés tomates et concombres… mis en place en extérieur.

    L’idéal me semble être un rempotage des plants greffés pour acquérir un système racinaire , important, avant la mise en place en extérieur..
    Si le temps ne permet pas les plantations en extérieur… l’arrosage des pots est réduit…
    La mise à fleurs est très dense, car les plants souffrent un peu et l’amendement est aussi réduit, jusqu’à la plantation finale. .(par contre la formation et la fécondation des fruits reste dense, avant la plantation… des anticipés aux entre nœuds équilibrent la végétation qui est dirigée sur deux têtes principales)….
    Avec le rempotage, vous pouvez obtenir des belles plantes qui peuvent atteindre 1m et plus, avant la plantation définitive en extérieur.

    Cela permet de les faire durcir , ne pas oublier de les rentrer en serre , en cas de période de gel..

    Bon jardinage et bonne récolte ( les concombres sont coupés à cinq feuilles pour permettre de la ramification)

  2. Alain Dozias dit :

    TRES déçu par les tomates greffées par rapport aux non greffées :
    une douzaine sur la non greffée et trois rachitiques sur les deux plants greffés !
    Sans compter le prix explosif !!!!!!!!!

  3. McCabe dit :

    Mon dieu, changer la police da caracteres.
    J’arrive difficilement à lire vos textes.

  4. HOHN dit :

    L’année précédente, les plans de tomates greffés m’ont plus que quintuplé la mise de fond (prix des plans) donc , je recommande, surtout en serre car on ne peut pas se payer le luxe des les voir mourir pour une raison quelconque (gel, mildiou…) en extérieur.
    par-contre j’aimerais bien savoir comment les entretenir car au pied de ces plans, de multiples départs, et je ne sais toujours pas s’il faut les couper en les considérant comme des gourmands ou pas;

    1. Il faut enlever les départs du pieds, surtout s’ils se trouvent sous le point de greffe.

  5. jpb551 dit :

    Quelques remarques qui correspondent à mon expérience personnelle de culture (en amateur)…

    1) Trop de vigueur nuit à la productivité.
    La vigueur des plants greffés associée à une grande quantité d’azote est totalement contre-productive. La croissance fortement végétative donne des fruits rares et petits. Pour exploiter le potentiel des plants greffés. Il faut au contraire mettre relativement peu d’azote, et beaucoup de potasse (ex: Patentkali) . J’ajoute de la magnésie qui me semble indispensable et qui équilibre l’excès éventuel de potasse (kiésérite…). C’est encore plus vrai avec des greffons de certaines variétés très vigoureuses: Le caractère végétatif du greffon et du PG s’additionnent et la production est encore moindre!

    2) La résistance aux maladies du sol apportée par le porte-greffe permet plus de productivité en terrain très contaminé par comparaison avec des plants francs.
    Il ne faut pas oublier que le greffage a été inventé d’abord pour apporter une résistance aux maladies du sol dans le cas de cultures professionnelles en monoculture sous serre. Certains porte-greffes sont très efficaces au niveau résistance aux maladies sur des sols fortement contaminés en culture intensive ne laissant pas de place à la rotation des cultures. Dans ce contexte, les plants francs sont très défavorisés et les maladies nuisent très fortement à la productivité, vs les plants greffés qui eux pourront se développer et produire « normalement », (dans une certaine limite…) alors que ces plants greffés en eux-mêmes ne seraient pas intrinsèquement plus productifs dans un contexte de culture non contaminée.

    Dans un potager en extérieur avec rotation régulière, ces porte-greffes ne vont strictement rien apporter, voire obtenir une productivité moindre. C’est ce que j’ai observé personnellement avec des tomates sur Protector ou Superpro. (c’est mieux en aubergines).

    3. L’augmentation de productivité en terrain sain dépend de la variété de porte-greffes.
    Par exemple, j’obtiens en général une très forte production avec des fruits nettement plus gros (en tomate, et encore plus en aubergine) avec d’autres porte-greffes comme par exemple Maxifort, (hélas pas disponible actuellement chez La bonne graine). Mais je ne les ai pas tous essayés…

    4. La productivité dépend aussi du nombre de branches.
    Nous savons qu’il y a deux écoles;
    – La suppression systématique des « gourmands » qui conduit à mener la culture des tomates sur une ou deux tiges par plant
    – Au contraire ne rien couper du tout et laisser « buissonner  » les plants de tomates (avec tous les inconvénients que cela implique) …
    Personnellement, je pratique entre les deux: Je laisse pousser un certain nombre de « gourmands », surtout quand ils poussent verticalement par exemple chaque fois que les tiges principales se divisent en deux, et j’arrive à la fin à 10-12 tiges en moyenne….
    Il est certain que le terme de « gourmands » est inapproprié dans la mesure où ces tiges sont aussi productives que les autres (sauf bien entendu quand il s’agit de départs situés sous le point de greffe)
    Et dans ce cas, il est évident que plus on garde de tiges, plus on aura des fleurs et donc des tomates, (et pas nécessairement plus petites!).
    Un porte-greffes très vigoureux va alors permettre de mener la culture sur bien plus de tiges, et par voie de conséquences de produire plus de récolte.
    La grande quantité de feuilles va augmenter la fonction chlorophyllienne du plant et permettre de fabriquer et nourrir plus de fruits. Cela va aussi faire de l’ombre et réduire les brûlures du soleil pour les cultures très ensoleillées.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *